En ce jour ensoleillé, une immense tristesse envahit les amoureux du Moyen-Âge, les passionnés d’Histoire, les ardents défenseurs de la vérité. Jacques Le Goff est mort.
Il est des 1er Avril qui ne font pas rire. Mais alors pas du tout.
Tandis que le pouvoir change de visage, une gigantesque bibliothèque s’en est allée. Comme ça. Sans mot dire, sans annonce, sans 20h, sans même un bisou à ses (nombreux) fans et enfants spirituels.
Ils sont trois à m’avoir donné la passion de l’Histoire, le goût d’aller plus plus loin. Alain Decaux, pour sa manière inimitable – même si souvent imité – de raconter, Maurice Druon avec Les Rois Maudits, et Jacques Le Goff pour la qualité de ses ouvrages et de ses recherches. Si plus tard viendra s’ajouter l’immense Jean Tulard, pour former mon quatuor préféré, mes quatre mousquetaires, Jacques Le Goff a sans conteste été le premier universitaire à me donner le goût de la recherche, et surtout, cette notion fondamentale de grille de lecture, de ce recul nécessaire sans quoi rien ne serait possible.
Avec des mots simples, des concepts efficaces et abordables, les ouvrages signés Jacques Le Goff étaient pour nous, étudiants, le Label Rouge es qualité. Citer « un Le Goff » et vous aviez déjà les bonnes grâces de l’examinateur.
Il a su rendre le Moyen-Âge à la lumière, luttant toute sa vie contre cet « obscur Moyen-Âge » que l’on voulait nous vendre à tous prix.
En cette période où l’on ne peut plus rire de tout, il nous restait au moins le 1er Avril … Et bien non, même plus.
Qui nous lancera encore des coups de gueule contre le réchauffement climatique, contre les peurs modernes nous faisant accroire que finalement nous n’avons pas quitté le Moyen-Âge et le millénarisme ? Qui va reprendre le flambeau ?
On m’a pris Druon, on m’a pris Le Goff, je frémis d’effroi pour mes mousquetaires.
Ce soir, je vais regarder ma bibliothèque, je vais feuilleter Un Autre Moyen Âge, La Civilisation de l’Occident médiéval, La Naissance du purgatoire, L’Imaginaire médiéval, L’Homme médiéval, et enfin Saint-Louis grâce auquel je prépare une émission que je ne savais pas encore être spéciale. Je vais les feuilleter avec bonheur, chaque page tournée me renverra mes années Fac, de ces moments où j’ai appris à apprendre. Nous tâcherons d’être dignes de vous.
Pour tout ça, Merci Monsieur !