Les mythes et légendes ont-ils une réalité historique ?
C’est une question très tendance dans notre société actuelle qui a besoin de se rassurer. Malheureusement, c’est souvent racoleur, blessant, injuste, pour ne pas dire limite scientifique.
Nous allons donc tour à tour croiser l’Atlantide, l’Exode, la lance de Longinus, Jésus Christ, le Graal, Excalibur, etc… et voir si oui ou non, avec nos connaissances actuelles, certains mythes et certaines légendes sont basées sur des réalités historiques.
Le débat est bienvenue, n’hésitez pas, au contraire, les thèses différentes peuvent faire avancer …
Récit bonus sur la Lance de Longinus :
Evangile selon St Jean (chapitre 19, versets 31 à 35) :
« Dans la crainte que les corps ne restassent sur la croix pendant le sabbat – car c’était la préparation, et ce jour de sabbat était un grand jour – les Juifs demandèrent à Pilate qu’on rompît les jambes aux crucifiés, et qu’on les enlevât.
Les soldats vinrent donc, et ils rompirent les jambes au premier, puis à l’autre qui avait été crucifié avec lui.
S’étant approchés de Jésus, et le voyant déjà mort, ils ne lui rompirent pas les jambes ; mais l’un des soldats lui perça le côté avec une lance, et aussitôt il sortit du sang et de l’eau.
Celui qui l’a vu en a rendu témoignage, et son témoignage est vrai ; et il sait qu’il dit vrai, afin que vous croyiez aussi. »
Le nom du soldat romain qui commit ce geste – Longinus – n’apparut que bien plus tardivement, dans l’Évangile de Nicodème, un apocryphe du IVe siècle. De ce fait, la Sainte Lance est fréquemment appelée « Lance de Longin ». La tradition chrétienne veut aussi qu’en perçant la poitrine du Christ, Longin, à moitié aveugle, ait reçu une goutte du sang et de l’eau du cœur percé, et en ait instantanément recouvré la vue.
> La Sainte Lance du Saint Empire Germanique
Celui qui a gravé le fourreau d’argent enveloppant la relique croyait de toute évidence que Maurice avait possédé la lance. L’étude des photos du fer montre que celui-ci fut brisé en deux à une époque et ressoudé ; le fourreau aurait donc été ajouté pour renforcer sa solidité. Cette brisure aurait pu être faite lorsqu’on a percé le fer pour y intégrer une sorte de clou. Mais pourquoi avoir ajouté cet objet à la relique au risque de l’endommager ? Et qui était le commanditaire de ce travail ?
Les réponses à ces questions nous mènent vers l’empereur Romain Constantin le Grand (272-337). Lorsque ce dernier accède au pouvoir, en 306 après J.-C., il se retrouve à la tête d’un empire divisé sur les plans politique et religieux. La partie occidentale est dirigée depuis Rome, en Italie, et l’orientale depuis Constantinople, en Turquie. Constantin, qui est un personnage ambitieux, souhaite réunifier cet empire bipartite, mais pour cela il doit éliminer son rival Licinius, qui règne sur l’Orient. Un conflit éclate alors entre les deux empereurs rivaux, qui s’achèvera par la défaite de Lucinius en 324, lors de la bataille de Chrysopolis. La légende veut qu’avant cet affrontement décisif, Constantin ait eu la vision d’une croix enflammée au dessus du soleil, accompagnée des mots « par ce signe, tu vaincras ». L’empereur en fut tellement ébranlé qu’il fit peindre les premières lettres du nom du Christ sur son bouclier et sur ceux de ses soldats. Selon cette même légende, il emporta la Sainte Lance au combat et s’adjugea la victoire grâce à son pouvoir.
Il embrassa alors la foi chrétienne, voyant dans celle-ci à la fois un moyen d’obtenir le salut personnel et de réunifier son empire divisé. Les chrétiens ne constituent alors qu’une faible minorité de ses sujets, répartis très inégalement à travers l’Empire, essentiellement en Orient et en Afrique du Nord. En embrassant cette nouvelle foi, l’empereur va pratiquer une politique favorable aux chrétiens tout en s’interdisant de persécuter les païens. Cette transition en douceur se traduit par l’abandon progressif de la monnaie frappée à l’emblème du soleil, en hommage à la divinité païenne Sol Invictus, remplacée par des symboles chrétiens. Constantin reconnaît également les tribunaux épiscopaux et fait du dimanche un jour férié obligatoire en 321, à l’exception des travaux des champs. Enfin, l’empereur accorde à l’Église des dons substantiels en argent et en terrains, soutenant la construction de grandes basiliques. Cette décision de faire du christianisme la religion impériale est très certainement l’une des plus importantes du monde antique, car elle permettra l’essor de la foi chrétienne à travers tous les territoires de l’empire Romain.
Après sa victoire, Constantin décide de faire de Constantinople la nouvelle capitale de l’Empire. Hélène, sa mère, convertie de longue date au christianisme, se rend alors en Terre Sainte à la recherche de reliques. Elle en reviendra avec un riche butin, dont ce qu’elle pense être des fragments de la Vraie Croix ainsi que des clous censés avoir servi pour la crucifixion de Jésus. Certains de ces clous seront sertis dans l’armure de Constantin afin qu’ils le protègent. Est-ce aussi elle qui fit incruster un clou dans la Sainte Lance afin d’en augmenter le pouvoir ?
En laboratoire, les experts ont analysé ce clou au microscope. Sur ces images agrandies, l’objet se révèle encore plus fascinant. En réalité, il ne s’agit pas d’un clou mais d’une pointe dotée de trois protubérances, chacune ornée d’une croix jaune. En quête d’indices sur l’origine de ces croix gravées, les chercheurs s’intéressent aux nombreuses autres pièces de la lance. Une modélisation informatique leur permet de reconstituer leur emboitement ; toutefois, loin d’éclaircir le mystère entourant la relique, elle en dessine un nouveau. En effet, à la base du fer se trouvent deux ailettes qui semblent avoir été ajoutées à posteriori, formant une pièce transversale qui n’existait pas sur les lances romaines mais que l’on trouve en revanche sur les lances médiévales. Provenant certainement d’une dague, les ailettes auraient été ajoutées au VIIe ou au VIIIe siècle. L’évidement de la lance et l’ajout du clou datent-ils de la même époque ?
La relique joua en tout cas un rôle clé durant le Moyen-âge. En 476 après J.-C., l’Empire Romain d’Occident s’effondre sous les coups de boutoir des barbares venus de Germanie. Dans la période de chaos qui suit, on perd la trace de la Sainte Lance pendant près de 200 ans. Les experts pensent que c’est durant cette période que les éléments « exogènes » auraient été ajoutés à la relique, en particulier les fameuses ailettes.
La Sainte Lance réapparait ensuite dans les mains d’un personnage les plus importants de cette époque : Charlemagne (768-914). Chrétien fervent autant que guerrier, il rêve de fonder en Europe un nouvel empire digne de celui de Rome. Pour cela, il va se lancer dans une série de conquêtes visant à réunifier une région allant de la Manche aux Pyrénées pour l’axe Nord-Sud, et de la péninsule Armoricaine au Rhin pour l’axe Ouest-Est. La légende veut que ce soit armé de la Sainte Lance que Charlemagne ait pu mener à bien ce projet titanesque aussi bien sur le plan militaire que politique. En l’an 800, le Pape Léon III le couronnera Empereur de cet immense territoire – le Royaume Franc – qui marque la naissance de l’Empire Chrétien.
Mais comment relier la Sainte Lance de l’empereur Constantin à Charlemagne ? Après la disparition de la relique dans l’effondrement de l’Empire Romain d’Occident, aucun élément ne permet en effet de dire comment elle put arriver entre les mains du roi des Francs. Pour de nombreux historiens, il s’agirait en fait d’une copie que Charlemagne, au courant du rôle que la relique avait joué dans la réunification de l’empire de Constantin, aurait fait réaliser à des fins symboliques. La Sainte Lance remplit en effet une double fonction : elle représente le soutien que le Christ apporte au souverain qui la possède et représente aussi le droit divin à gouverner et à conquérir.
Le fourreau de la lance révèle d’autres indices permettant de retracer son histoire après que Charlemagne l’ait eu en sa possession. On y trouve en effet l’inscription suivante : « CLAVVUS HEINRICVS DEI GRATIA TERCIVS ROMANORUM IMPERATOR AVGUSTUS HOC ARGENTUM IVSSIT FABRICARI AD CONFIRMATIONEM CLAVI LANCEE SANCTI MAVRICII SANCTVS MAVRICIVS », soit, littéralement, « Clou + Henri par la Grâce de Dieu Troisième empereur des Romains Auguste a ordonné que soit faite cette bande d’argent pour attacher solidement le Clou et la Lance de Saint Maurice ».
Cette mention rattacherait donc la relique à Henri III (1017-1056), descendant de Charlemagne, qui fut sacré Empereur du Saint Empire en 1046. Surtout, elle permet de faire remonter l’origine du fourreau d’argent – et peut-être celle du clou – au XIe siècle. Nous sommes donc très loin, à ce stade de l’enquête, d’une relique datant de l’époque de Jésus Christ.
La Sainte Lance n’en poursuit pas moins son cheminement à travers l’Histoire. On la retrouve ainsi jouant un rôle crucial dans la première Croisade. En 1098, les Croisés assiègent Antioche. Ceinte de puissantes murailles, possédant d’importantes réserves de vivre, la ville résistera pendant huit longs mois avant de tomber aux mains des assiégeants. Mais sitôt à l’intérieur de la cité, les nouveaux occupants se retrouvent eux-mêmes assiégés par une puissante armée Turque venue en renfort. A court d’eau et de nourriture, les Croisés voient leur situation empirer de jour en jour.
C’est alors qu’un moine du nom de Pierre Barthélémy, qui faisait partie de l’armée du Comte de Toulouse, Raymond de Saint-Gilles, prétendit avoir eu en pleine rue une vision de Saint André ; celui-ci lui aurait révélé que la Sainte Lance se trouvait sous la cathédrale Saint-Pierre d’Antioche. Fiévreusement, les Croisés se mettent alors à retourner le sol de la basilique et y découvrent effectivement un fer de lance. Pour eux c’est un signe divin : Antioche ne tombera pas aux mains des Turcs. Le moral regonflé à bloc, les Francs tentèrent alors une sortie, et malgré le côté désespéré d’une telle entreprise, parvinrent à mettre en déroute l’armée Turque, pourtant bien supérieure en nombre.
Malgré ce succès que l’on pourrait qualifier de miraculeux, l’authenticité de la Sainte Lance d’Antioche ne fait cependant pas l’unanimité parmi les Croisés. Plusieurs d’entre eux, avaient en effet déjà vu la Sainte Lance de la chapelle palatine de Constantinople. Face aux soupçons de manipulation qui pesaient sur lui, Pierre Barthélémy accepta donc de se soumettre à l’ordalie, c’est-à-dire au jugement de Dieu. Cet ancien mode de justice consistait à soumettre les plaignants à une épreuve dont l’issue, déterminée par Dieu, désignait la personne dans son bon droit. Brandissant la Sainte Lance, Pierre Barthélémy traversa un brasier devant l’armée des Croisés réunie au grand complet. Il en ressortit terriblement brûlé mais vivant, ce qui provoqua une quasi émeute dans l’assistance, certains pensant qu’un miracle venait de s’accomplir sous leurs yeux et se jetant sur lui pour le dépouiller de ses habits, considérés comme des reliques. Pierre mourra cependant quelques jours plus tard des suites de ses horribles brûlures, douchant l’enthousiasme des troupes et réglant du même coup la question de la sainteté de la relique trouvée sous la cathédrale d’Antioche.
Le fourreau d’or est peut-être la clé du mystère entourant la Sainte Lance du Saint-Empire Romain Germanique. Il comporte en effet une inscription, « LANCEA ET CLAVUS DOMINI » (« Lance et Clou du Seigneur »), qui la rattache à l’un de ses propriétaires attestés, Charles IV. Au milieu du XIVe siècle, celui-ci comptait devenir empereur du Saint Empire, mais il avait besoin pour cette entreprise de reliques importantes afin d’obtenir puissance et crédibilité auprès de ses pairs. Il s’appropria donc la Sainte Lance. Pour protéger cette relique, il fit construire une forteresse imprenable près de l’actuelle ville de Prague : le château de Karlstein. La Sainte-Lance et d’autres reliques prirent place dans une salle secrète située derrière l’autel de la chapelle. Persuadé de s’attirer les bonnes grâces des saints en prenant soin de leurs reliques, Charles aurait alors fait recouvrir le fourreau originel de la lance d’un second étui en or. Tous les experts s’accordent à dire que celui-ci date clairement du XIVe siècle.
Au début du XVe siècle, un descendant désargenté de Charles IV vendit la Sainte Lance aux échevins de Nuremberg. Elle se retrouve alors au cœur de l’un des commerces les plus lucratifs du Moyen-âge : celui des reliques. A cette époque, l’une des caractéristiques principales des reliques était en effet de susciter des dons en argent auprès des monastères ou des églises qui en avaient la charge. On se battait donc – littéralement – pour acquérir ces objets, qui pouvaient faire la célébrité d’un édifice religieux, voire d’une cité, et attirer des milliers de pèlerins qui y dépensaient leur argent.
A Nuremberg, une chapelle provisoire fut construite dans le centre ville pour abriter la Sainte Lance. Celle-ci était accompagnée d’autres reliques tout aussi étonnantes : une dent de Saint Jean-Baptiste, un fragment de bois de la Crèche, et un os du bras de Sainte Anne. Pendant un temps, l’Église va tirer un profit substantiel de ces reliques, mais avec la Réforme Protestante, marquée par une volonté d’un retour aux sources du christianisme, celles-ci furent peu à peu retirées des lieux de culte. Placée dans un coffret en argent ciselé, la Sainte Lance disparaît de la circulation et sombre dans l’oubli pendant quatre siècles.
En 1796, Napoléon fait la guerre un peu partout en Europe. Tandis que ses troupes approchent de Nuremberg, les conseillers municipaux décident de transférer la Sainte Lance à Vienne. Croient-ils en ses pouvoirs ou bien voient-ils en elle un symbole de pouvoir qui doit être impérativement soustrait à Napoléon ? On ne le saura jamais avec certitude, toujours est-il que la Sainte Lance prend alors le chemin de l’Autriche, transportée par un messager.
Malgré la promesse des Viennois de la restituer sitôt la paix restaurée, la Sainte Lance restera à Vienne pendant près d’un siècle. En 1933, Adolf Hitler arrive au pouvoir, et cinq ans plus tard il annexe l’Autriche à l’occasion de l’Anschluss. C’est la première étape de son plan d’édification d’un vaste empire nazi censé durer 1000 ans : le Troisième Reich.
Le Führer rafle aussitôt les joyaux et les reliques témoignant du passé glorieux du Saint Empire Germanique, et parmi ceux-ci se trouve bien entendu la Sainte Lance. Il la rapporte alors à Nuremberg, foyer spirituel du nazisme.
Après la défaite de l’Allemagne, les Alliés s’emploient à récupérer toutes les œuvres d’art et les reliques pillées par les nazis à travers l’ensemble des pays qu’ils ont occupés. La Sainte Lance est alors redécouverte à Nuremberg et aussitôt restituée au Musée de Vienne, où elle se trouve toujours aujourd’hui.
BIBLIOGRAPHIE
La Recherche no 391 du 01-11-2005, dossier Les archéologues réécrivent la Bible
Egypt, Canaan, and Israel in Ancient Times, Donald Redford, Princeton University Press, 1992
L’Égypte et la vallée du Nil T.2. De la fin de l’Ancien Empire à la fin du Nouvel Empire, Claude Vandersleyen, PUF, 1995
Le Graal, La naissance d’un mythe, Goulven Péron, Ar Strobineller, 2014
L’Homme qui devint Dieu, Gérald Messadié et surtout le livre qui l’accompagne : Les sources, du même auteur
Jésus, Jean-Christian Petitfils
Miracles d’un autre genre: récritures médiévales en dehors de l’hagiographie (à lire en ligne sur GoogleBooks)
Par Olivier Biaggini,Benédicte Milland-Bove
> article : la portée idéologique de la Sainte Lance
https://books.google.fr/books?id=GmMKPiCrcUsC&pg=PA123&lpg=PA123&dq=Miracles+à+Antioche+:+la+portée+idéologique+de+la+Sainte+Lance&source=bl&ots=ZejfmKQGG9&sig=amCrxcLC1ny3O74NmcQRQoUsXTE&hl=fr&sa=X&ei=M8VlVbrECoSAUc-MgKgL&ved=0CCIQ6AEwAA#v=onepage&q=Miracles à Antioche : la portée idéologique de la Sainte Lance&f=false
ARCHÉOLOGIE ET EXODE
http://www.lamed.fr/index.php?id=1&art=566
La Bible dévoilée: Les nouvelles révélations de l’archéologie de Israel Finkelstein et Neil Asher Silberman
Attention, certains partis pris !!
Le rapport Kissinger (en PDF – anglais)
http://pdf.usaid.gov/pdf_docs/PCAAB500.pdf
(synthèse du rapport en français)
http://uhem-mesut.com/public/fhs3.8.pdf
Document PDF (issu du site « Pensée unique »)
2 scientifiques français_14 janvier 14